Natural landscape, Terrestrial plant, Sky, Twig, Trunk, Wood, Tree, Deciduous

Une forêt de cèdres à Masson-Angers, un quartier de Gatineau. L’étude des anneaux de croissance de ces arbres permet de dater de façon très précise la construction des maisons anciennes de cette région.

En collaboration avec Pointe-à-Callière, Cité d’archéologie et d’histoire de Montréal

Ukraine

Les secrets de nos aïeux révélés par des arbres à Laval

Mise au point au début du 20^e siècle, la dendrochronologie étudie la variation interannuelle des cernes de croissance des arbres, afin de distinguer des schèmes de croissance communs aux arbres d’une même localité.

PARTAGE

Il s’agit d’une méthode de datation très précise qui permet, en présence du dernier cerne formé sous l’écorce, d’établir la date exacte d’abattage d’une pièce de bois à une année près, voire à une saison près. Par extension, la dendrochronologie permet de déterminer la période de construction de bâtiments ou d’anciennes structures en bois, de faire ressortir les différentes phases de construction d’un édifice et même de connaître la région de provenance des arbres utilisés.

Marie-Claude Brien et Alex Lefrançois-Leduc,

Archéologues

méthode d'enquête

L’étude des cernes de croissance permet de dater la construction de maisons

Près de la communauté de Waskaganish on trouve le site archéologique le plus ancien de la région côtière d’Eeyou Istchee : Sanders Pond. Aujourd’hui, ce lieu est sur une terrasse naturelle à 60 m au-dessus de la mer. Mais il y a 4000 ans, le paysage était bien différent. Ce campement était établi au bord de l’eau, dans le delta formé par l’embouchure des rivières Broadback et Rupert. Par comparaison, le plus proche campement possédant le même âge et des caractéristiques semblables (types d’outils, matières premières) est éloigné de 1000 km vers l’est, sur les côtes du Labrador. Sanders Pond est donc l’un des seuls témoins du vaste réseau d’échanges entre les populations qui sillonnaient le territoire du Québec avant l’arrivée des Européens.

Sanders Pond

Outdoor recreation, Trousers, Plant, Outerwear, Sky, Leisure

Pointes de projectile en pierre polie trouvées sur le site de Sanders Pond. Un autre exemple de la maîtrise de l’art de fabriquer de tels outils en pierre polie.

L’équipe au travail sur le site de Sanders Pond.

Un couteau en pierre polie découvert sur le site de Sanders Pond. Les habitants du site étaient passés maîtres dans l’art de fabriquer de tels outils en pierre polie.

Sky, Building, Window, Property, Tree, House, Plant, Fixture, Door, Cottage

Une maison de la rue des Patriotes, à Laval, est réputée avoir été construite entre 1729, année de concession du terrain à Pierre Filiatro, et 1763, année où la propriété a été cédée à son fils, Charles Filiatro. Située à l’est du cœur villageois ancien de Sainte-Rose, cette maison constitue l’un des plus anciens témoins bâtis du noyau villageois d’origine. En l’absence de données précises concernant son année de construction, il est apparu opportun de procéder à une analyse dendrochronologique de certaines composantes.

Cette analyse a permis de déterminer l’année exacte d’abattage de trois solives et d’estimer celle de deux autres. Avec ces résultats, on peut avancer que la maison a été construite en 1729 ou peu après, et qu’elle a été agrandie en 1766 ou peu après. Ces éléments de datation laissent donc croire que le carré de maison d’origine aurait été construit par Pierre Filiatro, tandis que l’agrandissement arrière aurait été réalisé par son fils, Charles, peu après que la terre lui a été cédée.

Maison patrimoniale rue des Patriotes, à Laval, datée par dendrochronologie.

Maison patrimoniale dans Sainte-Rose

Le principe fondamental de la dendrochronologie est l’interdatation, soit la mise en correspondance d’au moins deux séries de largeurs de cernes mesurés sur les arbres d’une même essence forestière.

La synchronisation de plusieurs pièces de bois trouvées sur un même site permet de déterminer une chronologie moyenne.

Cette chronologie dite flottante, puisque non datée, peut ensuite être recoupée avec des arbres datés, afin d’ancrer la chronologie dans le temps. On a alors un « référentiel » régional qui peut couvrir des centaines, voire des milliers d’années.

Au Québec, les possibilités de datation sont nombreuses. Des analyses dendrochronologiques sont fréquemment réalisées sur des pièces en bois provenant de sites archéologiques, sur terre comme sous l’eau, ou encore sur des bâtiments patrimoniaux dont on souhaite préciser les étapes de construction.

Toutefois, ces analyses, généralement concluantes, dépendent de l’existence de référentiels pour chaque espèce forestière et peuvent parfois être limitées.

Qu’est-ce que la dendrochronologie ?

Exemple de vestige archéologique pouvant faire l’objet d’une analyse dendrochronologique. Ici, une structure de consolidation de la berge sud de la Petite Rivière, aujourd’hui remblayée, à Montréal.

À gauche: principe de l’interdatation. À droite: mesure des cernes de croissance, qui fluctuent en fonction de variations environnementales annuelles, comme l’ensoleillement ou les précipitations. Les arbres d’une même région tendent à réagir de la même façon à ces variations interannuelles.

En haut: principe de l’interdatation. En bas: mesure des cernes de croissance, qui fluctuent en fonction de variations environnementales annuelles, comme l’ensoleillement ou les précipitations. Les arbres d’une même région tendent à réagir de la même façon à ces variations interannuelles.

Brown, Property, Wood, Rectangle, Window

On croyait que cette maison de L’Île-Bizard avait été construite entre 1900 et 1947. Négligée pendant plusieurs années, l’habitation était destinée à la démolition en prévision d’un projet d’ensemble résidentiel.

Un inventaire archéologique mené en 2021 a toutefois soulevé des doutes quant à la datation du bâtiment.

En effet, le dégarnissage des murs a révélé une structure ancienne en pièce sur pièce à coulisses, typique des 18^e et 19^e siècles. Deux pièces provenant de ces murs ont livré des dates de l’automne/hiver 1820, tandis qu’une troisième a pu être datée de l’automne/hiver 1775 et a vraisemblablement été réutilisée d’une structure antérieure.

Ces résultats ont ainsi permis de mettre au jour l’une des maisons les plus anciennes de L’Île-Bizard, caractéristique qui en a assuré la sauvegarde.

Dégarnissage de la maison de L’Île-Bizard ayant permis de découvrir un assemblage pièce sur pièce à coulisses.

Maison Ladouceur, dite « du jardinier »

Simon Mattawashish devant l’entrée de Waapushukamikw (l’antre du lièvre ou maison du Grand Esprit).

lieux des sites archéologiques

World, Ecoregion, White, Map, Product, Font

QUÉBEC

À explorer

Marie-Claude Brien est spécialiste en dendrochronologie depuis 2008. Elle détient un baccalauréat en sciences ainsi qu’une maîtrise en anthropologie. Travaillant dans le milieu de l’archéologie professionnelle depuis une quinzaine d’années, elle possède une expertise en matière de sites urbains complexes, en plus d’être spécialisée en dendrochronologie et en archéologie du bâtiment. Elle est copropriétaire de l’entreprise Arkéos depuis 2021.

Alex Lefrançois-Leduc pratique l’archéologie professionnelle depuis 2010. Il est spécialiste en dendrochronologie depuis 2011. Formé à l’Université de Montréal, il a suivi des formations spécialisées à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, ainsi qu’à l’Université de Lund, en Suède. Il est président du Groupe de recherche en dendrochronologie historique, un organisme à but non lucratif voué à la datation de bâtiments patrimoniaux et de sites archéologiques.

Site internet du Groupe de Recherche en Dendrochronologie Historique

People in nature, Glasses, Sky, Cloud, Plant, Tree, Smile, Standing

Qui sont ces archéologues ?

12 trésors archéologiques du québec

poursuivez votre lecture

Estrie
xxxxxx

Estrie
xxxxxx

Texte et recherche: Marie-Claude Brien et Alex Lefrançois-Leduc

Design et expérience numérique: Marcel Allard

Photos: Fournies par le Groupe de Recherche en Dendrochronologie Historique; par la Ville de Laval; Alain Vandal (Pointe-à-Callière); Naomi Senécal; Mathieu Mercier-Gingras

Illustration: Logiciel CooRecorder / Cybis Elektronik & Data AB