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12 trésors archéologiques du québec
12 trésors archéologiques du québec
lac-mégantic, estrie
lac-mégantic, estrie

En collaboration avec Pointe-à-Callière, Cité d’archéologie et d’histoire de Montréal
Voici la preuve du plus ancien peuplement humain jamais découvert au Québec
Région du lac Mégantic, 8 août 2003. Un jour de fouilles comme les autres… jusqu’à ce qu’une base de pointe avec une cannelure sur chaque face soit mise au jour. En examinant la cannelure centrale, je réalise que je tiens entre mes mains la preuve du plus vieux peuplement humain au Québec. Le site connu sous le nom de Cliche-Rancourt a 12 000 ans ! Il date en effet du Paléoindien ancien. J’espérais ce moment depuis plus de 20 ans. Un événement à jamais gravé dans ma mémoire…

Voici la toute première pointe en rhyolite du New Hampshire (hauteur : 3,2 cm) vieille de 12 000 ans, mise au jour en 2003 sur le site Cliche-Rancourt à Lac-Mégantic, en Estrie.
Claude Chapdelaine
Archéologue
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Le site Cliche-Rancourt est le premier, et le seul site connu à ce jour, à avoir dévoilé des pointes à cannelure typiques du Paléoindien ancien. Durant cette période, un groupe nomade a suivi le caribou au nord vers la fin de l’été, car la toundra persistait encore autour du lac Mégantic. Ces chasseurs ont emprunté le même col de montagne que les caribous. Puis ils sont retournés vers le sud pour passer l’hiver à l’abri dans un milieu forestier. Le chert rouge de la région du lac Munsungun, dans le Maine, et la rhyolite du New Hampshire sont les deux principaux matériaux identifiés sur le site Cliche-Rancourt. Ce qui permet aux archéologues de déduire que les premiers occupants du territoire québécois venaient de l’actuelle Nouvelle-Angleterre.
Il y a 12 000 ans,
sur ce territoire
Pointe à cannelure en chert Munsungun du Maine (hauteur : 3,1 cm) mise au jour sur le site Cliche-Rancourt en 2004.

Deux mille ans plus tard, lors d’une deuxième migration, des groupes sont venus coloniser les espaces libérés du glacier, dont le front était situé plus au nord. La technique de ces tailleurs de pierre a changé : les cannelures de l’époque précédente font place aux retouches parallèles. Toujours nomades et chasseurs, ces nouveaux groupes laissent des traces en Estrie, le long de la rivière Saint-François, dans le Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie. La ressemblance entre les pointes trouvées à Brompton, près de Sherbrooke, et celles mises au jour à Rimouski et à La Martre témoigne d’une tradition de la pierre taillée dynamique. Tous les tailleurs recourent à divers outils pour assurer leur survie, dont des bifaces, des forets et des grattoirs. En Estrie, la matière exotique est la rhyolite du mont Kineo, dans le Maine, alors que, dans le Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie, les groupes disposent de matières premières régionales de bonne qualité.
Ces groupes de tailleurs de pierre viennent de l’Ouest américain. Plusieurs vagues migratrices de ce peuplement initial du Québec sont en lien direct avec la déglaciation du territoire et son habitabilité. Flexibles et polyvalents, les groupes les plus anciens ont su s’adapter au froid, à la toundra, aux forêts et à un large éventail de proies : caribou, castor, ours, poissons… Lentement, le climat s’est réchauffé. Ces premiers groupes humains ont parcouru de grandes distances en tirant profit de chaque saison. Ainsi a commencé le peuplement du Québec.
Une histoire que l’on peut aujourd’hui raconter grâce à la découverte d’une pointe en pierre âgée de 12 000 ans !
D’autres précurseurs

1. Pointe de lance à retouches parallèles en rhyolite du Mont Kineo (longueur : 14,2 cm) trouvée à Brompton (Sherbrooke). 2. Pointe à retouches parallèles en chert (longueur : 5,7 cm), Paléoindien récent, provenant de La Martre en Gaspésie. 3. Pointe, biface (outil multifonctionnel) et foret en chert (longueur : 6,6 cm) trouvés à Rimouski.

Site des fouilles



Qui est cet archéologue ?
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Claude Chapdelaine a été professeur d’archéologie au Département d’anthropologie de l’Université de Montréal. Spécialisé en préhistoire du Québec, il a dirigé plusieurs chantiers de fouilles en Montérégie, au cap Tourmente, au lac Mégantic et ailleurs en Estrie. Parmi ses principales découvertes, la mise au jour des premières pointes à cannelure sur le site Cliche-Rancourt s’avère la plus excitante.
◼︎ Clovis, peuple chasseur de caribous à la Gare, centre-ville de Lac-Mégantic
◼︎ Le site archéologique Cliche-Rancourt
◼︎ L’exposition Archéologie régionale : notre contribution au Musée de la nature et des sciences de Sherbrooke
◼︎ Claude Chapdelaine, « Douze mille ans d’histoire amérindienne au Québec, le plus vieux chapitre », revue Archéologiques, no 27, 2014, p. 28-47.
◼︎ Jean-Yves Pintal, Jean Provencher et Gisèle Piédalue, AIR. Territoire et peuplement, Pointe-à-Callière et Les Éditions de l’Homme, coll. « Archéologie du Québec », 2015.

Claude Chapdelaine au site Cliche-Rancourt en Estrie, en 2008.
En collaboration avec: Pointe-à-Callière, Cité d’archéologie et d’histoire de Montréal
Texte et recherche: Claude Chapdelaine
Design et expérience numérique: Marcel Allard
Photos: Claude Chapdelaine et Aurélie Desgens
Illustrations: Mark Holmes et Catherine Trottier, Pointe-à-Callière











